top of page
Rechercher
Lysandra

Les violeur.se.s ne sont pas des monstres

Dernière mise à jour : 1 sept. 2022

Les violeur.e.s sont des gens biens, iels ont du talent, iels sont gentil.le.s, iels disent bonjour à mamie et lui offre des fleurs pour son anniversaire. Les violeurs sont des gens biens, et pourtant, iels peuvent violer.

Bill Cosby, Sean Penn, Johnny Depp, Serge Gainsbourg, Charlie Chaplin sont incontestablement des personnes de talent, d’incroyables créateurs, des philanthropes, et qui ont également commis des abus contre les femmes.


Comment est-il possible que toutes ces personnes que nous admirons, qui ont eu une influence positive aussi bien sur notre vie personnelle que sur la culture, se sont rendues coupables du pire?

Si vous pensez que l'on peut être une personne qui a accompli des choses formidables, une personne attachante et de pouvoir également commettre des actes très grave, alors vous êtes sur la bonne voie pour comprendre les mécanismes derrières les violences faites aux femmes.


La vérité, c'est qu'une personne peut à la fois être aimante, et capable de commettre un acte, voir des actes abjects. Les êtres humains sont complexes, et peuvent commettre le meilleur comme le pire.


La vision que l’on a des hommes violeurs/violent à l’égard des femmes est bien souvent simpliste, caricaturale.

Ce qui a pour effet dommageable que dès qu'une personne que l'on affectionne, que l’on respecte, est accusée d’avoir commis un crime, on ne peut la juger coupable, car on refuse de considérer qu'elle puisse avoir des contradictions : soit c'est un monstre, soit c'est la personne formidable que vous pensiez qu'elle était. Mais pas les deux à la fois.


Cette vision n'est pas vraiment proche de la réalité, et c'est ça le problème. Car les personnes responsables de violences physique ne sont pas toutes des monstres sortis de nul part, cela peut aussi être des personnes que nous aimons ou que nous admirons.

Attention, je ne dis pas que vous devriez vous méfiez de tout le monde.

Simplement imaginez ceci : vous venez d'apprendre qu'une personne a été victime d'un viol. Et vous découvrez que la personne qui a commis ce crime est votre cousin bien aimé. Ou un homme de dieu ~respectable. Ou un ami du collège. Ou un célèbre musicien, qui vous a aidé à surmonter vos passages à vide. Ou un formidable écrivain dont vous admirez le talent.

Comment allez vous concilier cette information - le fait que la personne que vous appréciez est capable d'avoir violée - avec votre croyance que les violeur.se.s sont forcément “des monstres”?


Difficile de concilier ces 2 notions opposées…

Donc soit vous en venez à la conclusion que la victime doit mentir, soit vous vous sentez honteux.se d'avoir pu apprécier un.e violeur.se.

Or, vous ne devez pas penser en ces termes.

En réalité, puisque les viols conjugaux sont un sujet complexe, il est nécessaire que l'on arrête de penser que les personnes “gentilles” sont incapables de la moindre violence.

Car la réalité est plus complexe que cela, et quand on perpétue ces idées manichéennes, on permet au cercle de la violence de se répéter.

Voilà ce qui arrive quand on pense que des personnes ne peuvent être que, au choix : - des personnes formidables… - ou des monstres :


1. On préfère blâmer la victime car on ne peut imaginer que lea violeur.se puisse être en tort.

Si vous pensez que seuls les monstres sont capables de viols et d'abus, et qu'en conséquent, un personne que vous savez ne pas être un monstre se voit accuser de viol, qu'en déduisez vous?

Malheureusement, beaucoup préféreront blâmer la victime. C'est ce que l'on constate très souvent que dans les affaires de viol, et c'est d'autant plus vraie quand lae violeur.se est généralement connu.e pour être “une bonne personne”

Si vous pensez que lae violeur.se n'aurait “jamais pu commettre une telle chose” alors vous sous entendez que la victime ment. Ou que c'est en partie de sa faute si elle a été victime.

C'est toujours ce que l'on remarque quand une célébrité est accusée d'avoir commis un viol.

C'est vrai par exemple pour Bill Cosby, accusé d'avoir violé et drogué des douzaines de femmes, et il a lui même reconnu l'avoir fait. Et pourtant, les victimes ont eu droit aux insultes et aux accusations.

Idem pour Johnny Depp.


“C'est elle qui a fait le choix de le suivre dans sa chambre d'hôtel, elle s'attendait à quoi?”

“Pourquoi a-t-elle attendu avant d'aller à la police”

“Cette [insulte misogyne] ne cherche qu'à se faire du fric”


Le truc, c'est que Bill Cosby est populaire, et que son image n'est pas réelle, on ne voit que son personnage télévisé, et non la personne derrière.

Et même si il existe toutes les preuves de sa culpabilité, et le fait qu'il a été si aimé et admiré, n'enlève rien au fait qu'il peut être un violeur.


Le viol n'est jamais de la faute de la victime. Quand vous perpétuez l'idée que le violeur ne peut être entièrement fautif si il est “gentil”, vous faites offense à tout.e.s les survivant.e.s.


2. On place les gen.te.s que l'on admire sur un piédestal et l'on refuse de leur attribuer la responsabilité de leurs abus.


Bill Cosby n'est pas le seul à avoir bénéficier d'un énorme bénéfice du doute, en raison de son image de “gentil”. Bien trop souvent, en admirant nos idoles, on les penses incapables du moindre défaut.

Ce qui n'est pas problématique quand on s'en tient à dire qu'iels sont les meilleur.e.s dans leur catégorie, mais ce qui devient problématique quand on les pense incapable de commettre la moindre erreur.


Il en va de même pour nos proches.

Par exemple, quand on admire un.e camarade militant.e, on en vient à penser qu'iel est incapable de commettre le moindre faux pas. Iel symbolise l'espoir, la libération, la lutte contre les oppressions.

Et cela peut être dévastateur d'apprendre que cette même personne a commis un abus. On en vient à nier l'existence de cet abus dans l'espoir que cette personne continuera ce combat qui nous tient tant à cœur, et qu'elle personnifie.


Mais ces personnes ne sont que des symboles, les voir comme parfaite leur enlève leur humanité.

Nous sommes toustes capable de commettre des abus, même ceux qui gravitent dans les milieux militant.e.s.

Pour réellement interrompre le cercle de la violence, nous devons considérer chaque personne comme un être humain, capable de commettre de graves erreurs.

Il faut privilégier les besoins des survivant.e.s, même si on a pu admirer leurs abuseur.ses. et mettre un terme au cycle de la violence.

Nos héro.ine.s ne sont pas infaillibles, et nous devons les tenir seul.e.s responsables de leurs erreurs.


3. Nous oublions les notions de justice et de responsabilité

Vous pouvez hésiter à rendre une personne responsable de ce qu'elle a fait, si vous avez peur des conséquences judiciaires pour elle si elle est reconnue coupable. Réfléchissons donc au sens du mot justice.

Très souvent, quand on parle de “punir le viol”, les gens se réjouisssent à l’idée que le violeur subira le même sort que ses victimes en prison. Ainsi, on préfère perpétuer le cycle de la violence, car “ces gens n'ont eu que ce qu'iels méritaient, en étant eux même victimes de violences sexuelles.”

Mais souhaiteriez vous la même chose à une personne que vous aimez?

C'est le cas, si pour vous, un.e violeur.se doit à son tour être violé.e pour que justice soit faite.

Or, pour que la justice soit faite, il ne faut pas nécessairement qu'il y ait eu de revanche.

Reconnaître la responsabilité d'une personne ne signifie pas que vous devez cesser de la voir, de lui parler, ou lui souhaiter le pire.


Vous avez le droit d'être horrifié.e, d'être dégouté.e, et de continuer de traiter cette personne avec dignité.


Etre proche avec une personne qui a commis un abus vous permet de mieux connaitre la complexité d'un être humain, vous savez qu'iel a commis des choses horribles, mais vous savez aussi qu'iel peut en commettre des bonnes.


Donc savoir reconnaître leur faute, c'est aussi savoir reconnaître leur meilleur facette. et les aider à reconnaître leur propre faute, et les emmener à respecter les besoins des survivant.e.s.


Cela ne veut pas dire que vous les excuser. Au contraire, vous les emmener à penser qu'iels valent mieux que cela.


Répondre à la violence par la violence peut causer plus de trauma et de division, que de résilience.


Il est possible de vouloir à la fois la justice et la réparation pour lea survivant.e et en même temps d'apporter son soutien au violeur.


Si vous pensez que vous ne pouvez vivre avec cela, et ne pouvez pardonnez au violeur, il est possible de mettre des barrière avec lui, pour votre propre bien être, sans pour autant considérer que cette personne n'est rien d'autre qu'un horrible monstre.

4. On simplifie la notion de consentement


Ce serait trop simple de classer les gen.te.s entre “les gentil.le.s” et “les monstres”, si le consentement était aussi une notion simple. Or le consentement peut être complexe.

Si pour vous le viol, c'est juste un obscur étranger qui attaque dans la nuit, alors vous avez sans doute du mal à imaginer que cela peut être une personne lambda.

Mais ce n'est pas la seule forme de viol ; et bien souvent, le viol, prend d'autres formes.

Cette idée “de l'étranger dans la nuit”, est dangereuse car elle occulte toutes les autres formes de viols : les viols par coercition, par chantage, ou le fait d'avoir pris le silence comme une permission. et elle invisibilise les viols conjugaux, les viols par abus de pouvoir.

Whoopi Goldberg a ainsi régit à propos du viol par Roman Polinsky d'une jeune fille de 13 ans. “ce n'était pas vraiment un viol” selon elle. Tentant de prouver qu'il n'avais été condamné qu'en raison de l'âge de la victime.

En tant qu'homme de 43 ans admiré, Polanski avait énormément de pouvoir sur sa victime qui ne pouvait consentir librement.

Le viol ce n'est pas juste une question de force physique, cela peut aussi être une question de pouvoir, d'influence.

Entre la vision binaire d'une “personne violemment attaquée par un étranger” et d'une personne “qui n'aurait jamais fait une telle chose” il y a bien d'autres formes de viols, qui peuvent s'appuyer sur la pression ou la manipulation.


Ce mythe du monstre laisse à penser que seules les personnes bizarres, ou anormales peuvent violer ; alors qu'une personne qui n'a pas respecté le consentement d'une autre personne peut être… parfaitement “normal”

5. On simplifie la notion de partenaire abusif.ve


Dans notre société, on aime à penser que l'on peut facilement repérer les partenaires abusif.ve.s.

A quoi pense-t-on quand on pense à un.e partenaire violent.e?

L'image la plus fréquente qui nous vient à l'esprit est celle d'un homme battant sa femme avec rage.


On pense que l'on peut identifier les hommes violents comme des gens mauvais et les éradiquer avec des slogans aussi simples que “les vrais hommes ne battent pas leurs femmes”. On dit des choses telles que “je ne laisserais jamais personne me battre”, et l'on a tendance à penser que les femmes qui se font battre n'ont “qu'à partir”.


Tous ces stéréotypes viennent à exclure du tableau toutes formes de violences qui ne cadrent pas avec ce type de représentation de ce qu'est la violence conjugale.

La violence peut exister dans les couples queer, la violence peut exister même si la personne victime de cette violence reste dans la relation, la violence peut provenir d'une personne que personne ne soupçonne d'être violente.


La violence conjugale peut prendre plusieurs formes : abus affectif, chantage émotionnel, abus financier, abus sexuel… Elle peut être cachée, invisible. elle peut exister chez les personnes racisées, blanches, favorisées, ou défavorisée.


La violence c'est aussi une question de pouvoir et de contrôle.

Il est donc impossible de juger, de l'extérieur, si une personne est capable de violence domestique ou pas.


Quand on se défait des stéréotypes sociétaux sur l'abus, sur le fait qu'une personne soit “gentille” ou “méchante”, on peut aider une personne à se sortir d'une relation toxique, ou aider une personne à ne plus commettre d'abus.

6. On se rend responsable de sa propre agression quand on est victime

Les survivant.e.s peuvent intérioriser le fait que les gen.te.s ne peuvent être que des saints ou des monstres. Ce qui est des plus dommageables.

Pour bcp de survivant.e.s, le scénario est le même : iels pensent que le violeur ne peut être qu'un monstre. Iel s'est entouré de personne de confiance, et s'assure de faire des choix qui ne lae mettront pas en situation de danger.

Donc, quand un proche, de confiance, devient abusif.ve, iels préfèrent se faire des reproches, en se disant qu'iel a du faire qql chose de mal, ou qu'iel aurait du voir le danger venir.


Si cela vous arrive, cela ne sert à rien de vous faire le moindre reproche, vous n'y êtes pour rien. Ce n'est jamais de votre faute si vous avez été victime d'abus, même si vous avez fait confiance à votre bourreau. Il est certes difficile de se dire qu'un proche a pu vous faire du mal, surtout si iel a ou vous faire du bien auparavant.

Même si ces sentiments sont contrariés, ces sentiments sont valides.

Et si vous essayer de comprendre comment une personne a pu être à la fois abusive d'un côté et “gentille” de l'autre, sachez simplement que ce n'est pas incompatible. La vérité c'est qu'un être humain est complexe, et comprendre cette complexité vous permettra sans doute d'aller vers la voie de la résilience.

Lysandra Source : everyday feminism

35 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page