Parmi les mythes les plus ancrés et les plus néfaste de la culture du viol, il y a celui selon lequel les hommes ne pourraient pas se contrôler, la faute aux hormones m’voyez. Les hommes ont des « besoins » c’est bien connu, c’est une vérité sacrée, et par conséquent, on ne peut pas les empêcher de sauter sur tout ce qui bouge.
Ce mythe, il est triplement pourri :
- d’un côté, il déresponsabilise les hommes pour leurs actions (c’est pas leur faute, c’est les hormones, donc on peut rien y faire ma bonne dame), fait sauter un verrou morale puisqu’ils s’auto persuadent qu’ils ne peuvent avoir la maîtrise de leur action
- il permet de renverser la charge de la responsabilité sur le dos de la femme (c’est à elle de mettre en place des stratégies pour éviter le viol, et si elle est violée, c’est qu’elle ne s’est pas suffisamment protégée, et bim, le victim blaming dans ta face) enfin,
- cerise sur le gâteau de la culture du viol : elle invisibilise les hommes cis victimes de viol. Oui, ils ne peuvent pas être victime de viol, parce qu’ils en ont toujours envie. Donc ils sont toujours consentants. Et les hommes asexuels ça n’existe pas.
Ce mythe est totalement bidon, dans les faits, aucun homme ne se jette, hors de contrôle, et zguègue à l’air sur la première personne venue dans la rue.
Non, les viols sont très souvent prémédités, préparés : l’homme attend que sa victime soit dans une situation de vulnérabilité (alcool, évanouissement, drogue, détresse émotionnelle/financière… ) avant le passage à l’acte.
Et soyons sérieux, si les hommes étaient réellement dans l’impossibilité totale de se contrôler, et bien… il faudrait tous leur faire prendre une castration chimique.
Si un homme se dit incapable de maîtriser ses pulsions, j’ai envie de lui dire, si tu as conscience de ta dangerosité mec, prend des mesures médicales urgentes, et si tu ne le fais pas… c’est que tu as envie de rester un danger pour les autres, et donc d’être un violeur.
Mais parlons plus sérieusement de ces méchantes hormones …
C’est quoi ces hormones au juste ?
Bon déjà, on va tou.te.s inspirer et expirer un grand coup devant l’absurdité du patriarcat.
Autant les hormones associées aux femmes cis sont une excuse pour disqualifier les femmes des postes à responsabilités, ou qui exigent d’elles du sang froid (alors qu’en vrai, elles gèrent mieux que les hommes)… autant les hormones des hommes cis leur servent d’excuse à leur crime.
Bon et puis je rappelle au passage qu’auparavant on pensait que les femmes avaient des crises de fureur utérine, qu’elles étaient folle de cul, ce qui justifiait que l’homme, avec son sang froid, devait être le maître à bord du couple. C’est quoi la testostérone au juste ? Selon wiki, « la testostérone joue un rôle clé dans la santé et le bien-être, en particulier dans le fonctionnement sexuel. Entre autres exemples, ces effets peuvent être une libido plus importante, une énergie accrue, une augmentation de la production de cellules sanguines et une protection contre l'ostéoporose. Étant un des principaux androgènes, la testostérone est nécessaire à un bon développement sexuel chez le mâle. »
La testostérone a indéniablement un effet sur la libido, c’est un peu à cause d’elle que les hommes cis « ne pensent qu’au cul », enfin, du moins… qu’ils y pensent souvent.
Les personnes les mieux placées pour parler du pouvoir de ces hormones sont probablement les mecs trans.
Je suis moi-même en couple avec un mec trans, qui m’a dit que la testostérone avait en effet décuplé son désir et ses besoins sexuels. Disons qu’avant il avait envie parfois mais pas tout le temps… fallait qu’il soit dedans quoi.
Et que maintenant… il en a toujours envie.
Et vous savez quoi ? il ne viole pas pour autant, il respecte mon refus quand moi j’en ai pas envie. Et si il a réellement une poussée de libido, et bien, il se débrouille seul, il ne me viole pas.
Tous les mecs trans sous testo m’ont confirmé cet effet : certes, la testo accroît leur désir et leur besoin, maiiiis, ils parviennent très bien à se maîtriser. Donc non, les hormones ne sont pas à blâmer, c’est bien le cerveau qui est en cause.
Bon, et puis comme le rappelle Maxence Ouafik, médecin, il n’y a pas à proprement parler d’hormones féminines ou masculine. Tous les sexes (binaires ou intersexes) produisent de la testostérone. Simplement, la femmes cis en produit moins et de manière cyclique : elle a un pic de testo pendant l’ovulation. Donc fuck cette histoire de testo, c’est du bullshit vous l’aurez compris.
Toutefois, c’est vrai, il est parfois difficile de maîtriser sa sexualité, et oui, c’est une maladie : l’addiction sexuelle. Pendant l’affaire DSK, les médias ont d’ailleurs présenté cette addiction comme excuse : il ne peut pas se contrôler, ce n’est pas la faute des hormones, ça va plus loin que ça, c’est la faute à son addiction sexuelle.
Une nouvelle excuse bidon ?
Donc parlons sérieusement de l’addiction sexuelle
Cette maladie affecte plus les hommes cis que les femmes cis : une femme est atteinte pour 5 hommes cis.
En quoi ça se traduit ? Selon le docteur Laurent Karila (psychiatre de l’addiction et spécialiste de la question), une personne souffrant d’une addiction sexuelle a un comportement répétitif, avec une perte de contrôle, malgré les connaissances des conséquences néfastes sur sa vie sociale (IST, perte d’un temps inconsidéré et d’argent sur les sites porno, les sites de rencontres, les lieux échangistes…)
La personne souffrant d’addiction sexuelle ne prend aucun plaisir à assouvir ses besoins, elle n’arrive pas à s’abstenir, elle a des pensées obsédantes, se masturbe frénétiquement, devient anxieuse, dépressive (perte totale d’amour propre) à cause de son addiction.
Vous avez vu le film Shame ? Bon ben le mec arpente les bars juste pour trouver un.e partenaire sexuel disponible (toujours consentant), il ne baise pas pour prendre du plaisir, il ne baise pas car la personne lui plait, il baise pour baiser, quitte à se mettre en danger.
Dans le Nymphomaniac, c’est pareil, l’héroïne explore des sexualités de plus en plus transgressives, afin de retrouver du plaisir, un peu comme un accro à l’héro qui prend des doses de plus en plus forte afin de retrouver la fulgurance de la première dose.
Les personnes qui ont cette addiction ont pour le coup de réels ~besoins sexuels~ impérieux. Et comment elles les assouvissent ? Non pas en violant, mais en allant dans des boites échangistes, en ayant recours aux services d’un.e travailleur.se du sexe, en écumant tous les bars jusqu’à trouver une personne, n’importe qui en fait, qui accepte une relation sexuelle. Alors attention, je ne dis pas que les personnes souffrant d’addiction sexuelle sont parfait.e.s, elles sont tout autant dans la culture du viol que les personnes n’ayant pas cette addiction. Simplement, elles savent mettre en place des stratégies pour assouvir leur besoins sans forcément contraindre une personne. Ces personnes sont en souffrance, et quand elles veulent sortir de cette addiction, elles vont se faire suivre par des psy (thérapie comportementale et cognitive), par des médicaments (antidépresseur sérotoninergiques). Ayant posée la question à Laurent Karila (qui m’a répondu super vite… milles merci) il m’a répondu « un addict au sexe n'est pas un agresseur sexuel ni un pervers sexuel au sens commun du terme (SM, voyeur, frotteurisme…)- si c'est le cas pour l'un des 2, c'est un autre trouble qui se rajoute et qui augmente la gravité du trouble » Donc là encore utiliser la carte « addict sexuel » c’est une fausse excuse, et c’est psycophobe. Utiliser une réelle maladie, qui est source d’une infini souffrance pour justifier des actes criminels, c’est justifier le viol et c’est indécent. Ces personnes sont suffisamment stigmatisées à cause de leur maladie (méconnue) pour ne pas avoir, en plus, à subir une étiquette de violeur en puissance. Le seul responsable d’un viol, c’est le violeur.
Lysandra
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